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Les antidépresseurs sérotoninergiques sont la catégorie d’antidépresseurs les plus prescrits par les médecins. Seulement, ces médicaments ont été peu renouvelés depuis cinquante ans. L’étude des récepteurs de la sérotonine constitue donc un enjeu important dans le domaine de la psychiatrie, explique Violette Richin en thèse au Cermep.
Appelée couramment « hormone du bonheur », la sérotonine joue un rôle central dans notre organisme. Ce neurotransmetteur présent dans notre cerveau – mais pas seulement – est impliquée dans la régulation de notre humeur, mais aussi notre appétit ou notre sommeil. Elle contribue d’une certaine façon à notre sensation de bien-être. D’ailleurs une dysfonction du système sérotoninergique a été observée dans plusieurs troubles psychiatriques comme la dépression mais aussi les troubles anxieux, l’anorexie ou encore la schizophrénie. C’est pourquoi les anti-dépresseurs ont généralement une action sur la sérotonine.
Si la sérotonine est synthétisée dans le cerveau, on la retrouve dans tout l’organisme. Les différentes actions qu’elle exerce sont régies par 14 récepteurs sur lesquels vient se fixer la sérotonine, et que l’on appelle récepteurs sérotoninergiques. Chaque récepteur est associé à diverses fonctions dans l’organisme. « La sérotonine est une sorte de passe-partout », explique Violette Richin, qui étudie un type particulier des récepteurs de la sérotonine. Le problème : autant de récepteurs pour la sérotonine, c’est d’autant plus de risque de voir des molécules autres – notamment médicamenteuses –s’y fixer à la place de la sérotonine. Or, « il est encore difficile d’avoir des antidépresseurs suffisamment spécifiques pour se fixer uniquement sur les récepteurs cibles responsables de l’action thérapeutique. C’est l’une des causes des effets indésirables des médicaments. Avec parfois des conséquences importantes pour les patients », explique cette doctorante, pharmacienne de formation.
Ainsi, dans le scandale du médiator, la molécule antidiabétique utilisée se fixait notamment sur des récepteurs de la sérotonine, les récepteurs 5-HT2B. Et en 2000, un article mettait en évidence le rôle de ces récepteurs dans les hypertensions artérielles pulmonaires et lésion des valves cardiaques (valvulopathies cardiaques).
Aujourd’hui, la recherche s’oriente vers la formulation de nouveaux médicaments plus ciblés pour limiter davantage les effets secondaires des médicaments. Dans le domaine des maladies psychiatriques, il est indispensable de mieux comprendre le fonctionnement des récepteurs de la sérotonine, dont la plupart sont encore mal connus. C’est justement le sujet de la thèse de Violette Richin, au Cermep, une plateforme de recherche en imagerie du vivant à Lyon.
Mais étudier les récepteurs de la sérotonine n’est pas simple. Il existe des techniques in vitro pour étudier les récepteurs (en culture cellulaire), certaines études sont menées post-mortem, mais elles ne reflètent pas le fonctionnement physiologique de l’organisme. C’est pourquoi cette doctorante utilise une autre méthode : les radiotraceurs. Ces molécules, combinées à des techniques d’imagerie médicale TEP (tomographie à émission de positrons), rendent visible la chimie du cerveau de manière non-invasive.
« Le but de ma thèse est de synthétiser de nouveaux radiotraceurs des récepteurs sérotoninergiques, afin de pouvoir étudier leur fonctionnement dans l’organisme », explique-t-elle.
Pour cette pharmacienne, le chemin à parcourir reste long avant d’arriver à de nouveaux médicaments. Mais l’enjeu est important dans le domaine de la psychiatrie. Les anti-dépresseurs toujours en usage sont anciens, et n’ont été que peu renouvelés au cours des cinquante dernières années. Un contexte favorable aux résistances médicamenteuses, aux effets indésirables et, à terme, à la non-observance des traitements par les patients.