La tendance actuelle de la recherche favorise les thématiques jugées a priori prometteuses. Mais les découvertes ne sont pas toujours programmables : nombre de prix Nobel sont nés d’un heureux hasard.
Quel est le point commun entre le nylon, la pénicilline et un Post-it ? Ce sont tous des accidents heureux, à rebours des tentatives actuelles de programmer la recherche. Une découverte obéit en effet à une dynamique partiellement aléatoire, impliquant quelquefois un domaine considéré comme dépassé. Trouver ce que l’on ne cherchait pas, c’est la sérendipité.
Inventé en 1754 par le romancier anglais Horace Walpole, sérendipité évoque le conte Les trois princes de Serendib (l’actuel Sri-Lanka). Partis en mission, les princes ne cessent de trouver des indices nécessaires mais sans rapport apparent avec leur objectif. Ainsi définie, la sérendipité allie le hasard à la sagacité : “Les idées expérimentales naissent très souvent par hasard et à l’occasion d’une observation fortuite“, écrivait ainsi Claude Bernard. Le scientifique se laisse porter par son intuition mais doit être capable de reconnaître et saisir les opportunités !
Tous les domaines ont été généreusement dotés par cette bonne fée (voir encadré). Astuce, goût de l’aventure et capacité à rebondir : autant de qualités incarnées avec brio par Miss Cayley, héroïne d’un roman très populaire au XIXe siècle. “Née avec sérendipité dans la bouche” sous la plume du romancier Grant Allen, ce personnage de femme indépendante a détonné dans une Angleterre très conservatrice. En sciences comme dans la vie, il faut parfois emprunter des chemins de traverse pour arriver à ses fins !
La sérendipité, une bonne fée penchée sur le berceau de la science
1799 : D’un coup de pioche, Pierre-François-Xavier Bouchard découvre la pierre de Rosette, qui permettra à Jean-François Champollion de déchiffrer les hiéroglyphes
1859 : Henri Mouhot se heurte aux ruines d’Angkor en poursuivant un papillon
1865 : Friedrich Kekulé voit en rêve la formule cyclique du benzène
1896 : Henri Becquerel découvre la radioactivité naturelle grâce à un aléa climatique
1928 : Alexander Fleming découvre la pénicilline par négligence
1957 : La benzodiazépine de Leo Sternbach évite la poubelle de justesse
1985 : Kary Mullis conçoit la réaction en chaîne par polymérase en conduisant la nuit